
SKY IS THE LIMIT
Des premières images sur des membres de l’équipage préparant les décollages aux flambants avions quittant le porte-avions, le tout sous une lueur rasante, à ce thème d’ouverture de Harold Faltermeyer et la fameuse “Danger Zone” de Kenny Lodgings en fond, peu de choses ont changé en 36 ans dans le monde Top Gun, et surtout pas le pilote de chasse préféré d’Hollywood …
Il en deviendrait presque inapproprié d’uniquement qualifier Top Gun de légendaire tant il a pu être une inspiration pour des milliers de personnes, tant il a pu marquer les générations et continuera de le faire sur celles à venir. Légendaire apparaît alors comme tout juste suffisant face à ce film cultissime. Inspirant, puissant, captivant, marquant, émouvant, bouleversant, resplendissant … une liste de mélioratifs loin d’être exhaustive où chaque féru des voltiges de Maverick pourra probablement rajouter son qualificatif personnel. L’édition originale avait façonné cette première génération Top Gun des années 80 : bombers en cuir ornés de badges et patchs divers sur le dos, lunettes aviateur sur le nez et un engouement pour l’aviation qui s’était traduite par un nombre de candidats à la NAVY comme jamais vu auparavant. Après presque quatre décennies d’attente, le phénomène est de retour. Top Gun : Maverick livre un second opus phénoménal, et c’est sans surprise qu’il fait une entrée fracassante au box-office. Dévoilé le 18 mai dernier au Festival de Cannes avec la présence exceptionnelle sur le célèbre tapis rouge de l’acteur phare Tom Cruise, Top Gun : Maverick avait tout pour égaler, si ce n’est surpasser, le succès 36 ans plus tôt de la version originale. Un mélange entre des images surréalistes, une bande-son prenante, une histoire légendaire et un héros choyé par tout Hollywood : la recette parfaitement dosée pour un succès foudroyant.


CINÉMATOGRAPHIE : La chorégraphie des vols, tant lors de l’entraînement que lors de l’apogée, est décrite de manière claire et palpitante. L’accent a été mis, tout au long de la production, sur la vraisemblance : les acteurs ont suivi un programme d’entraînement hors-norme de trois mois, sous l’eau et dans les airs, afin de se préparer à tourner dans de vrais avions de combat. Graduellement, les interprètes sont passés ainsi d’appareil en appareil pour se familiariser avec le vol, les forces G, puis les cascades aériennes. Ils ont même dû apprendre à contrôler eux-mêmes la caméra qui a immortalisé les séquences dans les F-18. Il semblerait même que toutes les scènes de vol aient été tournées dans de véritables F/A-18 de la marine américaine. Les images de synthèse, qui passent parfois pour le fléau des superproductions modernes, n’étant pas utilisées pour remplacer le spectacle mais pour le compléter avec parcimonie. Lorsque les jets fendent l’atmosphère et effleurent les sols de leur cible dans des mouvements rasants, la sensation qu’ils génèrent est miraculeuse et digne du plus grand écran qui soit. Des images époustouflantes à la musique composée par le seul et l’unique Hans Zimmer, véritable virtuose en son genre, qui offre encore une fois une bande-son des plus incroyables, transportant le spectateur dans des émotions reclues et inscrivant ce film dans un plaisir visuel et auditif total.
ACTION MAN : À vrai dire, cet intrépide héros d’action est l’un des dernières véritables superstars du cinéma d’antan, une notion d’immortalité qui s’amenuise lentement de nos jours. En effet, l’engagement constant de Tom Cruise envers le spectacle hollywoodien – ainsi que les niveaux insensés d’habileté physique qu’il met infailliblement sur la table en insistant pour faire ses propres cascades – mérite le même niveau de respect intellectuel habituellement réservé à ceux qui ont recours à une méthode complète, comme Daniel Day-Lewis. Qu’est-ce que Tom Cruise ne peut pas faire ? Licence de jet, licence d’avion commercial, licence de parachutisme, licence de plongée et, peut-être le plus surprenant, une licence d’agent immobilier.

Dans cette suite, Tom Cruise, apparemment sans âge, s’appuie sur le passage du temps, essayant constamment de défier sa réputation de “héros vieillissant” et de s’accrocher à ceux qu’il aime, avec Val Kilmer revenant dans le rôle d’Iceman. L’histoire tient d’ailleurs compte de manière touchante du déclin physique de l’acteur atteint d’un cancer dans la vraie vie. Le personnage incarné par Tom Cruise doit également faire face à des traumatismes passés, notamment la culpabilité persistante de son rôle dans la mort de Goose. Un traumatisme incarné par Bradley “Rooster” Bradshaw, le fils de Goose, interprété par Miles Teller, dans une performance impressionnante, que Maverick est obligé de former dans le cadre d’une mission à l’enjeu exceptionnel qui rassemble les meilleurs pilotes du pays à l’académie de vol éponyme.


LÉGENDE TOP GUN : Succéder au Top Gun original de 1986, qui avait tant marqué la société de l’époque, s’avérait un challenge hors-du commun que Joseph Kosinski, le directeur de cet opus, a dû relever. Comment garder l’esprit Top Gun, de cette Amérique flamboyante des années Reagan, tout en créant une nouvelle histoire aux accents d’aujourd’hui ? En termes de spectacle et de poids émotionnel, Top Gun : Maverick surpasse son prédécesseur en tous points, tout en s’appuyant sur lui avec amour. L’équivalent de la scène de volley-ball de l’original en est un exemple emblématique : ce qui n’était qu’un interlude spontané et inutile de postures masculines devient, dans Top Gun : Maverick, un exercice de renforcement de l’esprit d’équipe tout à fait délibéré. En respectant ce qui a précédé, mais aussi en s’en inspirant, Top Gun : Maverick évite habilement deux pièges dans lesquels tombent souvent les suites longtemps différées : une nostalgie excessivement révérencieuse qui frise la répétition, et une sorte de déconstruction qui oblige à remettre en question l’affection pour l’original. Le résultat est un blockbuster classique, direct, et qui plaît au public, qui ne trahit pas celui qui a fait son succès original mais qui réussit à ranimer les ressorts de l’émotion à l’aune des attentes des spectateurs d’aujourd’hui, fans depuis toujours et nouveau convertis.

